Homélie de l’Épiphanie

La visite des mages… Nous entendons chaque année ce passage de l’évangile selon St Matthieu, alors peut-être l’écoutons-nous distraitement en considérant qu’il s’agit d’un conte merveilleux destiné à faire rêver les enfants… Et pourtant, en 2023, ce passage d’évangile a encore des choses à nous dire !

Le récit est construit pour nous inciter à nous inspirer des mages pour notre vie de chrétiens… Matthieu écrit pour le peuple juif, qui sait pertinemment que la magie, le recours à la divination et autres tentations astrologiques sont formellement à rejeter. Le livre du
Deutéronome indique par exemple “On ne trouvera chez toi personne qui fasse passer son fils ou sa fille par le feu, personne qui scrute les présages, ou pratique astrologie, incantation, enchantement, personne qui use de magie, interroge les spectres et les esprits, ou consulte les morts. Car quiconque fait cela est en abomination pour le Seigneur.“ (Dt 18, 9-12).

C’est donc un curieux paradoxe alors de nous donner ces mages en exemple !

Justement, les mages sont tellement éloignés des habitudes et règles du peuple juif que cela souligne que la bonne nouvelle est pour le monde entier, y compris ceux qui ne sont pas de culture juive… Donc pour nous aujourd’hui!

C’est ce que Saint-Paul nous rappelle, dans la 2e lecture : la bonne nouvelle de l’incarnation de Dieu en Jésus est proposée à toutes les nations, qui sont associées “au partage de la même promesse dans le Christ-Jésus“. Cette promesse traverse les temps, et nous concerne aussi aujourd’hui.

Le bonheur qui nous est promis est également bien proclamé par Isaïe, dans la première lecture : Joie pour tous, abondance, lumière,
espérance qui nous sont promises nous invitent à ne pas nous décourager, malgré les vents contraires de notre époque.

Revenons au texte d’Évangile, et regardons comment les mages peuvent nous rejoindre concrètement aujourd’hui. Les mages dans leur pays lointain étaient attentifs à l’apparition de l’étoile, qu’ils savaient signe de la naissance de Jésus, Dieu fait homme.
Leur quête était remplie de vigilance, de persévérance, de patience et de confiance, autant d’états d’esprit auxquels nous avons été invités lors de notre parcours de l’avent 2022. Les mages étaient aussi des hommes pleins de courage, pour accepter
de se mettre en route sur des promesses incertaines, et ils ont du sans doute subir la dérision de leurs contemporains.

Ce que nous pouvons donc retenir pour nous aujourd’hui est l’ouverture du cœur des mages dans la recherche de la vérité et leur disposition à croire que c’est dans un petit enfant, faible et confié à l’humanité par les personnes de Marie et Joseph, que Dieu tout-puissant a décidé de s’humilier pour venir nous rencontrer, signe de son amour pour l’humanité.

La joie des mages est comblée lorsqu’ils se prosternent pour adorer l’enfant Jésus. Ils le reconnaissent comme roi suprême en lui offrant leurs présents, en particulier l’or et l’encens, intimement liés à la dignité de prêtre, prophète et roi.
La royauté de Jésus se manifestera concrètement, comme nous le rappelle le Psaume que nous avons entendu : “Il délivrera le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours. Il aura souci du faible et du pauvre, du pauvre dont il sauve la vie”.

Et notre responsabilité, à nous chrétiens, notre mission de disciples, est de donner à voir au monde, de donner à croire la réalité de l’incarnation de Dieu en Jésus, sauveur du monde. Comme les mages, nous sommes invités à adorer le seul vrai Dieu, et à nous détourner des idoles de notre monde que sont par exemple le pouvoir, l’avoir, le paraître, etc..

Les idoles, le mal, nous l’avons vu dans l’évangile, sont présents dans le monde où nait Jésus. Par contraste avec la joie et la confiance inébranlable des mages, nous voyons la peur chez Hérode, qui craint pour son pouvoir temporel. Le peuple de Jérusalem, semble t’il, ne souhaite pas être dérangé dans ses habitudes et redoute tout changement. Les grands prêtres et les scribes ne semblent pas non plus disposés à accueillir le messie berger du peuple d’Israël en la personne de Jésus.
Soucieux que rien ne change dans son univers, Hérode ira jusqu’au massacre d’enfants innocents, selon ce que relate la suite de l’évangile que nous avons lu, après la fuite en Égypte de Jésus et ses parents.
Cette violence et ce mal conduiront plus tard à la mort de Jésus sur la croix, déjà préfigurée par l’offrande de la myrrhe, substance utilisée pour l’ensevelissement des défunts.

La rencontre des mages avec Jésus les invite à prendre un autre chemin
pour rentrer chez eux. C’est un geste de désobéissance civile vis à vis
d’Hérode, mais surtout un signe des changements qui se sont opérés
dans leur cœur auprès de l’enfant Jésus.
Nous aussi, nous sommes invités à nous interroger sur le chemin que
nous suivons, pour être dans notre vie quotidienne, de plus en plus
rayonnants de l’amour de Dieu qui nous fait vivre. Une bonne résolution
peut-être en ce début d’année ? Bonne année à toutes et à tous!

Guillaume Amelin, diacre

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